Partir en Raid

Thomas Fauré

1. Les raids et le scoutmestre

a. intérêts (pédagogiques) du raid

La technique de raid permet de confronter le garçon à la nature et lui permet d’utiliser de nombreuses techniques scoutes : campisme, nature, topographie, cuisine trappeur, etc. C’est pour les garçons un défi (individuel ou de patrouille) où ils vont pouvoir mettre en pratique leurs compétences.
Vie dans la nature : elle permet un retour aux vraies choses et l’apprentissage du sens du concret. Dans la nature, pas d’artifices, l’exigence du vrai est omniprésente : vrai comportement, vraie vie d’équipe (patrouille ou tandem).
Aventure : un raid est une aventure, cela suppose de l’exigence et de la préparation.
Ascèse : on part en raid avec un minimum de matériel, le raid suppose une vie d’ascèse, cela n’empêche pas de prendre de quoi se nourrir très largement, mais les ingrédients ne seront peut-être pas très variés.
Le raid est un moment de désert. On y va pour se ressourcer afin d’être meilleur dans le monde. Lors d’un raid, on se coupe du monde, c’est ce qui le différencie de l’explo.

b. la place du scoutmestre

Le scoutmestre, comme pour les autres jeux, doit jouer son rôle en :

  1. suscitant l’aventure ;
  2. en donnant les moyens aux garçons de prouver leurs compétences ;
  3. en faisant progresser les scouts ;
  4. en créant une aventure complète ;
  5. en demandant aux scouts le meilleur d’eux-mêmes…
  6. et… en observant les garçons ! (ce qui suppose : être présent à un moment ou à un autre lors d’un raid.)

 

Le chef ne doit cependant pas tout faire mais bien laisser faire les garçons selon leur âge, leurs compétences et le type de raid.

Il est évident que le chef ne va pas demander la même chose pour un raid d’aspirant que pour un raid raider ou un raid « escoute » (cf. page 52 du livret de bord).

On peut tout imaginer :

  1. le scoutmestre donne un point de départ, un point d’arrivée : aux scouts de se débrouiller ;
  2. le scoutmestre donne un point de départ, un azimut et une distance (raid cap franc) ;
  3. le scoutmestre donne des points de passage ;
  4. le scoutmestre cache des messages le long du raid indiquant la route à suivre ;
  5. le scoutmestre donne les points de passage en coordonnées par CB ;
  6. le raid est préparé à l’avance avec le CP, validé par le scoutmestre ;
  7. une partie est préparée par le CP, ou le scoutmestre, l’autre est libre ;
  8. etc !

La place du scoutmestre dans différents types de raid :

Raid de classe :
le scoutmestre peut préparer le raid intégralement, ou aider le CP à le faire.

Raid de patrouille :
le scoutmestre peut préparer tout, une partie ou rien du tout et simplement valider.

Raid de troupe :
le scoutmestre supervise. Attention à bien laisser les patrouilles avec des missions distinctes et en autonomie.

Raid de maîtrise : pensez-y, car ce que vous faites faire aux scouts, vous devez être capable de le faire aussi ! Le scoutmestre peut déléguer à un assistant.

Pendant le raid :

La scoutmaîtrise doit être joignable à tout instant (téléphone, CB…).
Il est bon (voire indispensable) que le scoutmestre aille sur le terrain observer ces gars. Pour ce faire, allez faire un « raid sioux » derrière les garçons ! Suivez-les discrètement pendant un bout de chemin. Donnez-leur des points de rendez-vous, ça peut être l’occasion de faire un rappel, une traversée de rivière ou autre chose d’un peu sportif (attention à la réglementation).

Après le raid :

Le scoutmestre peut accueillir ses garçons à l’arrivée, ils concluent ensemble le raid par une prière d’action de grâces, les gars lui remettent leur carnet de raid. Le scoutmestre peut lire tout de suite le rapport, ça valorisera les garçons qui sont à fond et brûlent d’impatience de partager ce qu’ils ont fait. Une lecture avec eux peut être très sympa.

Pour des cas particuliers : accueil à la base de troupe, de patrouille, partage d’un chocolat chaud préparé par le scoutmestre… Soyez inventifs !

Quelques cas de raids, à appliquer abondamment :

c. Les raids de progression personnelle :

Raid d’aspirant :

(se reporter au Maîtrise n° 150)
Ce type de raid est une découverte de la technique de raid pour le jeune scout.
Il est préférable de ne pas envoyer les aspirants seuls dans la nature mais on peut demander à un scout de seconde ou première classe d’accompagner un ou deux aspirants en raid. Ainsi cela donne une responsabilité sérieuse au garçon de classe et permet une véritable initiation aux techniques de raid.
Comme le raid est fait pour les aspirants, sa difficulté est minimisée et les techniques très diverses. On peut faire par exemple un raid mi-woodcraft mi-explo, ou simplement woodcraft. Ce sera l’occasion pour les aspirants de découvrir les azimuts, les coordonnées, la cartographie, les croquis, la mise en place d’un bivouac, etc. Rien ne sert de vouloir voir trop de chose à la fois. Une chose bien faite vaut mieux que dix bâclées.
C’est le raid d’accoutumance décrit dans le livret de bord.

Raid de classe (seconde et première) :

Que ce soit seconde et première classe, ces raids sont similaires et ne diffèrent qu’en difficulté et en diversité des techniques.

Pour la seconde classe, les scouts partent à trois. Les scouts qui partent peuvent recevoir une enveloppe avec les consignes au départ du raid. Ils ne savent au départ que les horaires et lieux de rendez-vous.

On peut également imaginer que les scouts préparent eux-mêmes leurs raids en intégralité, mais en optant pour la solution décrite ci-dessus, cela permet au scoutmestre d’entretenir et de créer un esprit d’aventure et de départ spontané, l'inconnu est une composante de l'aventure très importante.

Chaque raid doit être unique, et cela doit marquer les garçons.

Ceci dit, dans une partie du raid, les scouts peuvent décider de leur itinéraire et une grande partie peut être laissée à leur initiative, surtout en raid de première classe. Utilisez un maximum de techniques pour que le raid de classe soit vécu comme un jeu scout. Vous pouvez coder des cordonnées, l’enveloppe peut contenir plusieurs enveloppes à ouvrir à plusieurs moments, etc. Faites preuve d'imagination !

Il est bon de faire participer le CR à la préparation de la réflexion pour les raids de progression personnelle. Celle-ci en tous les cas à toute son importance et il est bon que les garçons prennent du temps pour réfléchir autour du feu le soir avant de s’endormir.
Chaque réflexion doit être adaptée au gars.

d. Les raids de patrouille :

C’est l’occasion pour la patrouille de se souder et de vivre une aventure concrète où chacun jouera son poste d’action à fond (d’où l’idée d’avoir des postes d’action utiles !).

Différents raids sont proposés dans le livret de bord, voici quelques aventures vécues dans nos troupes :
 
Raid nature pendant le camp : au camp d’été, les patrouilles ont chacune un parcours jalonné d'épreuves les menant à un même but. Elles ne se rencontrent pas et restent dans la nature. Au programme : orientation, suivi de rivière, traversée en pont de singe, azimut dans les broussailles, messages à décoder...
Exemple : la patrouille la plus expérimentée devait suivre une rivière puis arriver à un moulin où une caisse d’intendance les attendait. Ensuite : azimut sur 5 kms. Les scouts étaient suivis par liaison CB. La deuxième patrouille avait simplement un azimut à suivre. Les deux patrouilles avaient une mission commune sur le thème de la nature.

Raid escoute de patrouille pendant l’année : il s’agissait d’aller faire le repérage d’une zone qui paraissait intéressante sur la carte et que nous ne connaissions pas sur le terrain. La patrouille a donc reçu de la part du scoutmestre la fiche « mission » et elle est partie de manière autonome.

Raid « cap franc » : Pendant un camp de pâques, c’était un petit raid d’une demi-journée (repas trappeur inclus) où les patrouilles n'avaient qu’un azimut, une distance et un point particulier à trouver au bout de cet azimut. On peut demander aux scouts d’effectuer un relevé d’itinéraire, c’est l’occasion.

Raid Wingate : Ce type de raid se parcourt intégralement dans la nature. Le thème de jeu est « Les raiders de Wingate en Birmanie » (cf. Michel Menu…). Le raid se déroule sur un ou deux jours. Au départ du raid, on donne à la patrouille les points de passage en coordonnées UTM ou Lambert II. La patrouille part sans tente, sans outils, sans nourriture. A chaque point, on a « parachuté » la caisse d’intendance, un jerrican, un double toit, une pelle-bêche... etc. La patrouille récupère au fur et à mesure ce dont elle a besoin.

2. Le carnet de raid

A chaque raid, le scoutmestre peut donner un carnet de raid avec le rappel de quelques "règles du jeu". En voici un bon exemple :

a. Check-list (adaptée de Michel Menu) :

Inspirée des aviateurs qui passent tout en revue avant de décoller, la check-list a du bon ! On vérifiera qu’on a tout avant le départ et que son sac ne dépasse pas 9-10 kg. On n’est pas obligé de tout emporter mais il faut au moins en évoquer la nécessité.

* Le ravitaillement en premier ! Pour 1 déjeuner, 1 solide dîner et 1 petit-déjeuner, sans oublier quelques suppléments ! Le ravitaillement doit se cuisiner à la façon trappeur car un raid à la boîte de conserve, sans cuisine trappeur, sans pain sur la braise, n’est pas un raid.
* Gourde à grande capacité, quart, gamelle, opinel, cuillère, fourchette, torchon. Allumettes dans un tube-plastique parfaitement étanche, même quand on emporte un briquet. 1 vieux journal bien à l’abri et 100 ou 150 grammes de bois sec au cas où…
* Hachette : on la porte gainée à la ceinture et elle est inséparable de la tenue de raid.
* 1 bâche pour s’abriter de la pluie.
* Duvet, pull pour la nuit, culotte légère de survêtement comme pyjama et, éventuellement une paire de chaussettes de rechange.
* Isolant de sol (tapis de sol)
* Trousse de toilette, papier W.C.
* Trousse topographique avec la carte du raid, rapporteur, double-décimètre et boussole. Cette dernière un objet personnel, aussi utile au scout en raid que sa hache et son couteau. Les pilotes, les parachutistes pendant la guerre recevaient une boussole d’évasion. Elle était dissimulée dans un bouton de leur uniforme.
* Carnet de bord où on notera tous les évènements, anecdotes ou réflexions pendant le raid. On pourra l’utiliser pour faires des relevés météorologiques, la composition des menus, etc…
* Petite trousse de secours avec 1 désinfectant, quelques sparadraps ou pansements, etc.
* Evangiles, chapelet.

b. La tenue de raid :

La tenue est l’uniforme impeccable (béret compris !) accompagnée éventuellement d’un solide bâton qui peut se révéler nécessaire en raid, en terrain accidenté.

Les différents usages du bâton de raid peuvent être :
- Arme de défense en forêt
- Franchir un ruisseau
- Improviser une civière
- Vérifier la profondeur d’un cours d’eau
- Construire un bivouac de raid ou un abri d’urgence

c. L’esprit du raid 

Le raid se fait en silence et en pleine nature, à l’écart de la population. Il est l’occasion pour le scout de mettre en application toutes les techniques qu’il connaît. C’est aussi un moment de réflexion, l’occasion se tourner vers le Christ dans la prière.
« Pendant ces 24 heures de paix, marchez, courez, arrêtez-vous, admirez, goûtez le silence, priez. » nous dit Michel Menu.
La première règle du raid est le silence la seconde la discrétion… La lampe de poche est l’ennemie du « raider », laissez plutôt vos yeux s’habituer à la nuit et y découvrir mille choses inconnues… pendant la marche parlez peu, écoutez la nature, arrêtez-vous de temps en temps pour relever une trace d’animal, faire le croquis d’un beau paysage ou simplement boire un peu d’eau.

d. « L’heure raid »

Pendant le raid, au moment qui vous convient le mieux, vous choisirez une heure dans la journée où vous vous arrêterez pour faire un point fixe. Ce sera une heure où vous pourrez lire l’Evangile, avez-vous déjà eu une heure pour lire la vie du Christ ? Alors c’est le moment. Chacun s’isolera des autres et se mettra en présence du Seigneur.

e. Le service de raid

La bonne action est la première obligation du scout, ne l’oubliez pas en rendant un service discret et anonyme lors de votre raid. Des papiers sales ramassés, une clôture réparée, etc. A vous d’être attentif au service et aux autres.

f. Le bivouac

Le bivouac ne comporte pas de tente. Il ne s’agit nullement d’une expérience ostentatoire, c’est dans l’esprit des « raiders ». Selon le temps vous vous ferez contre le vent et la pluie un abri de branches ou une bâche. Il n’y a jamais de temps perdu à consacrer une heure de plus à la construction de sa hutte. Le feu qu’on allume devant, bien à l’abri du vent et des regards, brûlera la nuit. Les chaussures et la chemise pourront ainsi bien sécher.

g. Le compte-rendu du raid

Il n’est pas nécessairement un exercice de plume. Il pourra comprendre une dizaine de pages avec par exemple :
- le gros plan de la zone où vous avez été parachuté
- la hutte de bûcheron que vous avez rencontrée, ou le héron observé…
- un emplacement de coin de patrouille que vous avez rencontré
- votre réflexion
- les épreuves réalisées
- une conclusion, ce que le raid vous a apporté, la place que vous souhaitez lui voir tenir dans votre vie.
Le rapport de première classe est personnel.

h. Epreuves à valider pendant votre raid

Niveau seconde classe (issues de « la patrouille T’ATTEND ») :
Orientation – A : tu sais prendre un azimut, t’orienter avec une boussole et le soleil.
Orientation – B : tu sais orienter une carte et la lire en identifiant 20 signes de terrain.
Techniques d’exploration – A : tu effectues 1 croquis panoramique.
Nature – 6 : Tu constitues pour la patrouille un herbier à base de photos de la flore de la région.
Raid aventure – A : Tu accomplis à deux durant 24h un raid à la carte et à la boussole sur un trajet déterminé et ne dépassant pas les 20 kms.
Raid aventure – B : tu sais préparer ton équipement spécifique pour un raid.
Raid aventure – 1 : Tu sais fabriquer un abri en branchages et tu en confectionnes un en raid.

Epreuves propres au raid et validant les catégories « Orientation » et « Raid aventure » :
- se faire cuire son pain (farine, levure, sel, eau)
- réaliser un croquis topographique précis 

Niveau première classe (issues de « Nouvelles épreuves de 1ère Classe ») :
Cran & décision – raid – woodcraft :
- Tu installes une hutte, sans bâche, de façon à pouvoir te protéger (humidité, froid, etc.).
- Tu te constitues de façon à être opérationnel un équipement complet de raid.
- Tu vis seul une journée et une nuit dans la nature comme un trappeur en organisant ton bivouac et en cuisinant ton pain.  
Orientation – topographie :
- Tu effectues un point de station (utilisation du carroyage, gisement inverse, triangulation) pour te repérer sur une carte.
- Tu réalises un croquis topographique.